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Prologue

Infobox

Diese Seite ist Teil einer Materialiensammlung zum Bildungsplan 2004: Grundlagen der Kompetenzorientierung. Bitte beachten Sie, dass der Bildungsplan fortgeschrieben wurde.

Aufgabenbeispiel

Anne Percin: L'â ge d'ange, 2008

Dans un lycée, deux camarades de classe, issus de milieux différents, se connaissent à peine.
Au fil du temps, leur relation devient de plus en plus étroite.

Il avait dix-sept ans et moi aussi.

Il avait les cheveux coupés en brosse, les yeux noirs, un pli soucieux entre les sourcils. Il avait la tête qu'ont presque tous les gamins dans les rues des pays de l'Est. Ces gosses qui se battent, mentent, trichent et volent et cherchent l'affection partout. Le contraire de moi.

Il portait des maillots de sport et des chemises à carreaux de bûcheron canadien. C'étaient les chemises de son père. En été, les manches étaient arrachées. Sur ses maillots, des taches de graisse. Son père était garagiste dans une petite station-service, en périphérie de la ville. Ils vivaient à cinq dans un appartement au-dessus de l'atelier, avec un balcon qui donnait sur la route et des rideaux rouges derrière les fenêtres.

Je m'en souviens, des rideaux rouges, et de ce jour où j'aurais tant aimé les voir s'ouvrir ...

Il s'appelait Tadeusz. Fils d'immigrés polonais. Certains disaient « Ta douche », c'est à peu près ainsi que se prononce son prénom. Mais personne n'osait se moquer devant lui. Par lâcheté, plus que par respect.

On appelait notre lycée le Gymnasium. Dans la ville haute, c'était un grand établissement de bonne réputation, fondé il y a des siècles. Les élèves comme Tadeusz, on pouvait les compter sur les doigts d'une main. Des deux mains, à la rigueur. On savait d'où ils venaient : de quartiers dont les seuls noms faisaient peur à nos parents. On savait que les profs les préféraient à nous , parce qu' ils en avaient bavé pour parvenir là où nous avions atterri sans effort. On savait que leurs parents plaçaient tous leurs espoirs en eux, quand les nôtres n'avaient placé que de l'argent.

Dans la cour, en classe, en étude, on les observait de loin, ils nous regardaient de haut.

C'étaient les rois et les reines du ruisseau, des Esmeralda ou des Gavroche à la Hugo, proches de nous et pourtant au-delà. Bien du côté de la réalité sur laquelle on nous avait appris à fermer les yeux. De l'autre côté de notre monde, un côté où pesaient sur leurs épaules des fardeaux qui nous semblaient dignes d'un mauvais roman. Avec ça, les devoirs toujours faits, le bac avec mention ...

Comme si ça ne suffisait pas à nous les rendre étrangers, ils étaient dotés de quelque chose qui nous faisait totalement défaut ... Je ne sais pas très bien comment appeler ça, même aujourd'hui. La solidarité, l'esprit de corps ?

On nous avait élevé dans la concurrence. Les parents, les enseignants nous poussaient à nous surpasser. On nous représentait la vie comme une jungle où nous étions les prédateurs. Elevés comme des jaguars.

Eux , ils avaient l' esprit de meute . En attaquant un , même indirectement , même  sans y penser, par maladresse, par manque de tact, c'était les insulter tous. Ils avaient l'amour-propre chatouilleux.
Tadeusz savait cogner comme les autres, malgré une propension à la rêverie pacifique. Il se tenait à l'écart de la meute. Et pourtant, les jaguars avaient peur de lui. Parfois, il avait des élans de brutalité qui s'achevaient dans le rire. Mais le plus souvent , il se contentait d'écouter en souriant, un peu ailleurs, un peu supérieur. Il avait conscience de sa force, mais n'en faisait rien. Quand il passait près d'un groupe d'élèves dans la cour, il amorçait un geste brusque qui faisait sursauter l'un d'eux. Puis sa main levée retombait sur ses cheveux, qu'il ramenait en arrière d'un mouvement lent.

Le geste de menace s'achevait en dérision. C'était tout lui.

Pendant longtemps, je l'ai côtoyé sans le connaître. J'en rêvais un peu, vaguement, peut-être. Jusqu'à ce que sa vie vienne se cogner à la mienne ...

Le choc fut si violent que, des années plus tard, alors que j'écris ces lignes, je tremble.

Anne Percin, L'âge d'ange
prologue, 660 mots

Wortangaben

les cheveux coupés en brosse = ein Bürstenhaarschnitt
les sourcils (m./pl.) = die Augenbrauen
un bûcheron = ein Holzfäller
la lâcheté = die Feigheit
à la rigueur =  hier: au maximum
en baver (fam.) = souffrir
le ruisseau = hier: die Gosse, der Rinnstein
Esmeralda = personnage dans Notre-Dame de Paris (1831),  roman der Victor Hugo (1802 - 1885)
Gavroche = personnage dans Les Misérables (1862), roman de Victor Hugo
un fardeau = eine Bürde, eine Last
être doté de qqch. = posséder qqch.
faire défaut = manquer
un prédateur = ein Raubtier, ein Räuber
chatouilleux, se = hier: sensible
une propension = ein Hang
amorcer qqch. = hier: etw. andeuten
s'achever en dérision = zum Spott werden
côtoyer qqn. = mit jdm. in Berührung kommen

Prologue:
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